Traiter les maladies cutanées rares en greffant de la peau saine, c’est l’approche de cette équipe de chirurgiens dermatologues de l’Université de Nagoya : une autogreffe épidermique cultivée qui intègre les corrections des mutations génétiques et transmet toutes les caractéristiques d’une peau saine permet de corriger les zones lésées et d’éliminer la maladie. Ces travaux, publiés dans le British Journal of Dermatology, appellent à d’autres recherches pour affiner l’approche et élargir ses bénéfices à davantage de patients, offrant ainsi de l’espoir à tous les patients touchés par ces troubles cutanés incurables.
La greffe de peau est couramment utilisée pour traiter les brûlures graves ou les grandes plaies. L’équipe japonaise a eu l’idée d’appliquer cette approche aux maladies cutanées des rares.
Ces autogreffes épidermiques qui consistent à greffer des cellules cutanées naturellement corrigées sur les zones touchées semblent en effet permettre de contrôler la maladie cutanée liée à des mutations génétiques. L’exemple est ici donné avec l’ichtyose épidermolytique (EI) et de l’ichtyose aux confettis (IWC) et donc la greffe de peau saine sur les zones enflammées.
L'EI et l'IWC sont des maladies génétiques cutanées rares causées par des mutations dans l'un des 2 gènes qui fabriquent la kératine dans la peau, KRT1 ou KRT10. La kératine étant importante pour le maintien de l’intégrité de la peau, ces mutations conduisent à une peau fragilisée qui présente des cloques et forme des plaques épaisses et squameuses. Certains patients souffrant de ces maladies présentent de grandes plaques de peau saine dans les zones touchées.
Ces zones de peau préservées résultent d'une recombinaison somatique,
un processus par lequel des modifications génétiques spontanées corrigent les mutations en modifiant les gènes à l'origine de l'affection cutanée. Cela permet parfois aux zones touchées de revenir à un état sain et ce mécanisme est à la base de la recherche actuelle.
L’étude est en effet basée sur l’hypothèse d’une exploitation possible de ce processus naturel de recombinaison somatique. En réalisant des autogreffes épidermiques cultivées (ACE), qui contiennent des corrections de mutations génétiques qui donnent une peau saine, et en greffant ces cellules cutanées naturellement corrigées sur les zones touchées, la maladie pourrait être contrôlée.
- Ici, les chercheurs évaluent la faisabilité de greffer ces cellules dérivées de kératinocytes épidermiques dépourvus de la mutation kératinique chez 3 patients atteints ;
- les autogreffes épidermiques cultivées (ACE) ont été précisément greffées au niveau des lésions de desquamation des patients ;
- 4 semaines après la greffe, 2 des patients ne présentent plus aucune récidive d'ichtyose dans toute la zone traitée,
- le 3è ne présente aucune récidive dans plus d'un tiers (39,52 %) de la zone lésée.
- 24 semaines après la greffe, les 3 participants présentent une « certaine » récidive de l'ichtyose au niveau des sites de transplantation.
A ce stade de la technologie, les chirurgiens concluent que la meilleure utilisation consiste à soulager les symptômes lorsque la maladie est grave et à traiter les symptômes locaux de l'EI dans des régions spécifiques qui affectent la qualité de vie.
Cependant, la voie des mécanismes naturels de correction génétique du corps apparaît d’ores et déjà une option prometteuse, et des essais cliniques vont être tenus afin d’améliorer l’approche et de la tester pour d’autres maladies cutanées rares.
Source: British Journal of Dermatology 13 May, 2024 DOI: 10.1093/bjd/ljae193 Treating epidermolytic ichthyosis and ichthyosis with confetti with epidermal autografts cultured from revertant skin
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